Les “Dark Kitchen”, ce nouveau modèle de restauration créé aux États-Unis, il y a plus de deux ans maintenant, est né d’une forte agilité et une grande capacité d’innovation. Ces restaurants fantômes sont dédiés au business de la livraison, sans l’expérience physique d’un restaurant traditionnel. Cette tendance, favorisée par le succès des plateformes de livraison à emporter, est désormais en plein essor et pour cause : la pandémie mondiale. En effet, il y a plus de 25 000 restaurants présents sur Uber Eats en France, 1 500 d’entre elles sont des “Dark Kitchen”. Au début de la crise sanitaire, en mars 2020, il n’y en avait à peine 1 000. Cette innovation fait la promesse d’une expérience client unique, comprenant repas de qualité et confort intimiste du repas à domicile.
Les influences qui leur ont donné naissance…
Il y a quelques dizaines d’années, ce concept de restaurant dit « fantôme » aurait pu sembler inimaginable. Mais alors, quelles tendances et influences ont rendu celui-ci l’un des concepts de restauration les plus prometteurs pour l’année 2021 ?
- La génération Y, ou encore appelée « Digital Natives » est en grande partie responsable de la digitalisation de nombreux secteurs. Cette génération comprenant les personnes nées entre les années 1980 et 2000 est une génération multicanale, ultra connectée. Nouant une relation de proximité et d’intimité avec le digital, cette génération fait de la technologie un outil nécessaire dans son quotidien. Par conséquent, la digitalisation des restaurants répond parfaitement à la demande de cette cible.
- La livraison à emporter, elle aussi est devenue une référence et une norme dans nombre de secteurs, au cours des quinze dernières années : 3,3 Md€ c’est le montant estimé de la restauration à domicile. Avec l’arrivée de la livraison à domicile chez des géants tels qu’Amazon, elle a su trouver une place évidente sur le marché de la restauration.
- La Covid-19, a largement favorisé cette nouvelle tendance de consommation. En effet, de par les confinements, la fermeture de certains établissements physiques ou les nouvelles normes sanitaires, la pandémie mondiale a vivement accéléré ce concept. D’après le baromètre NPD Group, le secteur de la restauration a su se réinventer par le biais des ventes à emporter, ainsi que de la livraison à domicile. On peut relever un point positif : certains seniors, plus réticents à l’arrivée de ces nouvelles tendances digitales, se sont laissés séduire par la livraison à domicile durant ce contexte difficile.
Quels sont les avantages de ces « restaurants fantômes » ?
L’essor de la vente à emporter et de la livraison à domicile, suivi de la situation mondiale actuelle, ont rendu judicieux d’envisager ce nouveau concept de restauration digitale. Mais quels sont réellement les bénéfices de cette nouvelle tendance ?
1. Une réduction importante des coûts d’exploitation
Investir dans une Dark Kitchen signifie bien évidemment moins d’apports financiers que pour un restaurant physique traditionnel. En effet, le matériel (tables, chaises…) ou encore la décoration ne sont plus utiles puisque ces restaurants 2.0 n’accueillent plus le grand public. Dès lors, les ressources humaines sont également réduites, puisque celles-ci se limitent au personnel en cuisine. Enfin, les locaux jouent également un rôle majeur dans la réduction des coûts. Ils sont nécessairement plus petits et peuvent se situer dans des zones où le trafic est plus faible.
2. Une grande adaptabilité et flexibilité
Les restaurants fantômes donnent la possibilité d’expérimenter facilement de nouvelles marques, de nouveaux menus ou encore de nouveaux concepts. Aussi rapidement que les tendances alimentaires des consommateurs changent, les Dark Kitchen peuvent s’adapter et tester des concepts, sans crainte d’être trop engagées. Cela permet aux restaurants fantômes de proposer une large diversité au menu. Effectivement, des marques de Junk Food ou bien de Healthy Food peuvent provenir de la même cuisine. C’est le cas du concept « Foudie », né à Toulouse, en France. Ce restaurant virtuel propose le Click & Collect, ainsi que la livraison à domicile avec Uber Eats. Il s’agit d’une cuisine pour huit concepts, passant de la célèbre Poutine canadienne, aux saveurs du Japon, en n’oubliant pas les spécialités « made in USA ». Cette grande flexibilité permet alors à ces restaurants de maximiser leurs chances de toucher une large clientèle, et ainsi d’augmenter considérablement leurs ventes.
« Dark Kitchen », les limites de ce modèle !
De plus en plus tendance, ces restaurants fantômes évoluent sur un marché concurrentiel. Il existe des limites à prendre en compte quand l’on souhaite se lancer dans cette restauration connectée.
1. L’absence physique
Les Dark Kitchen n’ont pas de présence physique ce qui signifie que leur visibilité est entièrement digitale et qu’elles sont confrontées à une forte concurrence. Il faut donc prévoir un budget colossal en publicité et marketing, afin d’être compétitif sur le marché.
De plus, l’absence des clients en physique pourrait impacter le personnel. Celui-ci pourrait se sentir lésé dans ce nouvel environnement de travail, ainsi qu’impacté face à la réduction des pourboires.
Cette unique présence numérique soulève également la question de la fidélisation envers sa clientèle. Ces restaurants doivent offrir aux consommateurs un parcours client plus que qualitatif, s’ils souhaitent établir de solides relations à distance avec eux.
2. La dépendance des plateformes en ligne
Il existe de véritables exigences technologiques, dans ces restaurants virtuels, qui reposent principalement sur le service en ligne. Dépendantes de plateformes en ligne, telles qu’Uber Eats ou encore Deliveroo, elles leurs imposent leurs prix et taux de commission. Ce système de réservation doit assurer bon fonctionnement et sécurité. C’est pour cela que certains restaurants privilégient davantage leur propre système de réservation sur leur site. En s’entourant d’experts dans ce domaine, ces Dark Kitchen deviennent ainsi agiles et augmentent leur satisfaction client. Le fait d’avoir leurs logiciels et matériels informatiques leur permet de maîtriser leur parcours digital client.
Quelle configuration de « Dark Kitchen » peut-on adopter ?
En constante évolution, les restaurants fantômes peuvent se mettre en place sous différentes formes. En revanche, le processus opérationnel demeure le même : des plats sont commandés, cuisinés et livrés. Leur configuration les différencie :
1. Les restaurants fantômes dits « traditionnels »
Il s’agit du modèle standard des Dark Kitchen qui repose sur l’achat ou la location d’une cuisine, accompagné d’un réseau de livraison pour traiter les commandes. Les restaurants fantômes qui marchent le mieux ont souvent adopté dans un premier temps cette configuration, pour ensuite devenir une Dark Kitchen multimarque. José Fabregat, fondateur de Food Haven en Espagne en est le parfait exemple. Il crée son premier restaurant virtuel en 2018, à Barcelone. Aujourd’hui, son concept a désormais plusieurs marques et tend à s’exporter dans le reste de l’Espagne, au Royaume-Uni, ainsi qu’aux États-Unis.
2. Les restaurants 2.0 à emporter
Très similaires aux Dark Kitchen traditionnelles, ces restaurants donnent la possibilité aux clients de choisir la livraison à domicile ou de récupérer leur commande en Click & Collect directement dans la cuisine. Il est judicieux d’avoir une solution complète, tant aux niveaux des logiciels, que du matériel, afin de répondre efficacement au besoin des consommateurs connectés. Basées sur la Business Intelligence, ces solutions optimisent le traitement et la gestion des commandes. Reposant sur les ventes à emporter, ce modèle favorise la fidélisation client puisque l’on peut échanger avec le personnel dans un lieu physique.
3. Les « Dark Kitchen » multimarques
On retrouve ce modèle lorsqu’une société mère partage sa cuisine avec ses différentes marques, afin de réduire les coûts opérationnels. C’est le cas de Küto, la nouvelle Dark Kitchen qui regroupe plusieurs marques de street food. Ce concept parisien a largement suivi la tendance actuelle des restaurants fantômes. Créé par un chef cuisinier et par un investisseur de brasseries, Küto promet une grande qualité, en livraison et à emporter. Pour cela, cette Dark Kitchen mise sur trois marques aux identités bien différentes. On retrouve « Toster » : les burgers à déguster sans culpabilité, « Honi Poki » : une cuisine hawaïenne chargée en vitalité, et « Hikyo » : l’initiation aux bons sushis.
4. Les restaurants virtuels sous-traités
Cette configuration permet aux Dark Kitchen de sous-traiter à une autre entreprise spécialisée : la préparation de repas, le traitement des commandes, ainsi que leur livraison. En effet, l’essor des restaurants virtuels n’est pas passé inaperçu chez les entrepreneurs. De nombreuses entreprises surfent sur cette tendance. C’est le cas de deux londoniennes, qui sont les fondatrices de Karma Kitchen, spécialisée dans la location de cuisine, ainsi que de Karma Cans, une société de livraison de repas.
5. Les restaurants fantômes appartenant à un agrégateur
Les agrégateurs de livraison proposent un espace de cuisine libre, à louer. Un avantage majeur pour les restaurateurs qui bénéficient du parc de l’agrégateur, de la création d’un menu, ainsi que de la possibilité de commander en ligne. Parmi ceux-ci, on retrouve Fritchi, entreprise française de livraison de repas à domicile, qui possède ses propres Dark Kitchen depuis sa création.
Ainsi, les Dark Kitchen apportent la solution à une nouvelle tendance de consommation. Avec la construction de belles marques, ces modèles peuvent s’assurer d’avoir une rentabilité parfois bien supérieure à des restaurants traditionnels de ville. Pour cela, il est plus que nécessaire de s’entourer d’experts du digital afin de renforcer sa marque, développer ses ventes et créer de nouveaux parcours clients.